Dire les sens,
Oublier les mots,
Serrer contre son coeur
Un peu d'air, un peu d'âme.

Pascal Usseglio
 
9 juillet 2009 4 09 /07 /juillet /2009 12:21

Par les soirs bleus d'été, j'irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l'herbe menue:
Rêveur, j'en sentirai la fraîcheur à mes pieds.
Je laisserai le vent baigner ma tête nue.

Je ne parlerai pas, je ne penserai rien:
Mais l'amour infini me montera dans l'âme,
Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature, - heureux comme avec une femme.

Arthur Rimbaud

6 avril 2009 1 06 /04 /avril /2009 11:00

Le jour légende qu’on ne raconte plus
Vieux théâtre dans l’avenir perdu
Vaisseau de poussière qui s’éteint quand on y pense

L’eau s’éloigne de sa source
Se mêle à la boue sans visage
Les cris forment une chaîne
D’horizons sans mémoire

On ne voit plus rien de face
La vie s’en va nuque rentrée
Le dos de la douleur voûte l’éternité

Mais sous le feu gisant des larmes
Le chant combat l’obscure saignée

Armen Tarpinian
in La vie de retour (1946)


Si vous voulez découvrir les textes de ce grand poète de notre temps :
Le chant et l'ombre
Editions La Part Commune
Février 2009

22 décembre 2008 1 22 /12 /décembre /2008 13:40
Le printemps est inexorable.

Pablo Neruda
28 octobre 2008 2 28 /10 /octobre /2008 12:14

Il dit non avec la tête
Mais il dit oui avec le coeur
Il dit oui à ce qu'il aime
Il dit non au professeur
Il est debout
On le questionne
Et tous les problèmes sont posés
Soudain le fou rire le prend
Et il efface tout
Les chiffres et les mots
Les dates et les noms
Les phrases et les pièges
Et malgré les menaces du maître
Sous les huées des enfants prodiges
Avec des craies de toutes les couleurs
Sur le tableau noir du malheur
Il dessine le visage du bonheur.

Jacques Prévert

17 avril 2008 4 17 /04 /avril /2008 12:20

En hommage au poète, voici un de ses textes

Prophétie


où l'aventure garde les yeux clairs
là où les femmes rayonnent de langage
là où la mort est belle dans la main comme un oiseau
saison de lait
là où le souterrain cueille de sa propre génuflexion un luxe
de prunelles plus violent que des chenilles
là où la merveille agile fait flèche et feu de tout bois

là où la nuit vigoureuse saigne une vitesse de purs végétaux

là où les abeilles des étoiles piquent le ciel d'une ruche
plus ardente que la nuit
là où le bruit de mes talons remplit l'espace et lève
à rebours la face du temps
là où l'arc-en-ciel de ma parole est chargé d'unir demain
à l'espoir et l'infant à la reine,

d'avoir injurié mes maîtres mordu les soldats du sultan
d'avoir gémi dans le désert
d'avoir crié vers mes gardiens
d'avoir supplié les chacals et les hyènes pasteurs de caravanes

je regarde
la fumée se précipite en cheval sauvage sur le devant
de la scène ourle un instant la lave
de sa fragile queue de paon puis se déchirant
la chemise s'ouvre d'un coup la poitrine et
je la regarde en îles britanniques en îlots
en rochers déchiquetés se fondre
peu à peu dans la mer lucide de l'air
où baignent prophétiques
ma gueule
ma révolte
mon nom.

Aimé Césaire

5 septembre 2007 3 05 /09 /septembre /2007 12:09
Au petit jour naît la petite aube, la micraube
Puis c’est le soleil bien à plat sur la tartine
Il finit par s’étaler, on le bat avec le blanc des nuages
Et la farine des fumées de la nuit
Et le soir meurt, la toute petite crêpe, la crépuscule.
Raymond Queneau
21 août 2007 2 21 /08 /août /2007 20:56

On ouvre le parapluie sous la musique de la nuit
On ouvre le parachute sous le ciel de l'enfance
On ouvre un regard sur la main qu'on vous tend
On ouvre la danse sous les balcons de l'amour
On ouvre la nuit au jour qui s'en va
On ouvre le plaisir à la jouissance qui vient
On ouvre le cri à celui qui ne vous entend pas
On ouvre l'imagination à tous les saints d'esprit
On ouvre à tous les fous une guerre.
On ouvre  le sable sous nos corps
On ouvre la mer au vaste hyménée
On ouvre des caresses de pierre au coeur durci d'indifférence
On ouvre des chansons d'entreguerre aux gens d'autrefois
On ouvre des pages au livre de la vie
On ouvre des mystéres pour être plus secret
On ouvre des chaînes pour blesser la liberté
On ouvre des châles pour pleurer quelques larmes
On ouvre des balles au ventre des fusils
Onouvre des rêves aux tourments de la haine
On ouvre des fleurs sur des champs de béton
Mais on ouvre l'interdit à tous les interdits
Et l'enfer tournoie sous nos yeux indécents
Et l'étreinte du diable traverse nos jeux
On n'aura plus de paix nulle part.

Isab
publié sur le blog Quotidiens

19 août 2007 7 19 /08 /août /2007 22:02

Où finissent les silences,
Des mots jamais prononcés
Tous les "je t'aime" oubliés
Dans les larmes des absences ?

Il est là, debout, le regard éperdu
Gravant sur l'horizon ses rêves et passions
Délestant dans un souffle ses adorations
Ces indomptées chimères de fruit défendu

Quand s'achèvent donc les quêtes
Des chemins d'éternité
Cendres d'authenticité
Semence de nos tempêtes ?

Ô toi le voyageur entends-tu son néant
D'où s'écrie en évent le hurlement des maux ?
Et vois-tu scintiller, mosaïque d'émaux
Ses bleus céruléens, des Cieux se détachant ?

Où finissent les silences
Des maux jamais énoncés
Ceux qui meurent oubliés
Tout en guidant nos errances

Il était là, debout, son esprit suspendu
Au rythme balancé du temps qui s'évapore
La poussière de ses vers se répandra encore
Quand le glas de nos vies lui aura répondu

Krizalyd, publié le 7 août 2007
sur le blog "
Comme une bouteille à la mère"

14 juillet 2007 6 14 /07 /juillet /2007 12:54
De deux choses lune
l'autre c'est le soleil
les pauvres les travailleurs ne voient pas ces choses
leur soleil c'est la soif la poussière la sueur le goudron
et s'ils travaillent en plein soleil le travail leur cache le soleil
leur soleil c'est l'insolation
et le clair de lune pour les travailleurs de nuit
c'est la bronchite la pharmacie les emmerdements
les ennuis
et quand le travailleur s'endort il est bercé  par l'insomnie
et quand son réveil le réveille
il trouve chaque jour devant son lit
la sale gueule du travail
qui ricane qui se fout de lui
alors il se lève
alors il se lave
et puis il sort à moitié éveillé à moitié endormi
il marche dans la rue à moitié éveillée à moitié endormie
et il prend l'autobus
le service ouvrier
et l'autobus le chauffeur le receveur
et tous les travailleurs à moitié réveillés à moitié endormis
traversent le paysage figé entre le petit jour et la nuit
le paysage de briques et de fenêtres à courants d'air de corridor
le paysage éclipse
la paysage prison
le paysage sans air sans lumière sans rires ni saisons
le paysage glacé des cités ouvrières glacées en plein été comme au coeur de l'hiver
le paysage éteintle paysage sans rien
le paysage exploité affamé dévoré escamoté
le paysage charbon
le paysage poussière
le paysage cambouis
le paysage mâchefer
le paysage châtré gommé effacé relégué et rejeté dans l'ombre
dans la grande ombre
l'ombre du capital
l'ombre du profit
Sur ce paysage parfois un astre luit
un seul
le faux soleil
le soleil blême
le soleil couché
le soleil chien du capital
le vieux soleil de cuivre
le vieux soleil clairon
le vieux soleil ciboire
le vieux soleil fistule
le dégoûtant soleil du roi soleil
le soleil d'Austerlitz
le soleil de Verdun
le soleil fétiche
le soleil tricolore et incolore
l'astre des désastres
l'astre de la vacherie
l'astre de la tuerie
l'astre de la connerie
le soleil mort.
Et le paysage à moitié construit à moitié démoli
à moitié réveillé à moitié endormi
s'effondre dans la guerre le malheur et l'oubli
et puis il recommence une fois la guerre finie
il se rebâtit lui même dans l'ombre
et le capital sourit
mais un jour le VRAI SOLEIL VIENDRA
un vrai soleil dur qui réveillera le paysage trop mou
et les travailleurs sortiront
ils verront alors le soleil
LE VRAI LE DUR LE ROUGE SOLEIL DE LA RÉVOLUTION
et ils se compteront
et ils se comprendront
et ils verront leur nombre
et ils regarderont l'ombre
et ils riront
et ils s'avanceront
une dernière fois le capital voudra les empêcher de rire
ils le tueront
et ils l'enterreront dans la terre sous le paysage de misère
et le paysage de misère de profits de poussières et de charbon
ils le brûleront
ils le raseront
et ils en fabriqueront un autre en chantant
un paysage tout nouveau tout beau
un vrai paysage tout vivant
ils feront beaucoup de choses avec le soleil
et même ILS CHANGERONT L'HIVER EN PRINTEMPS.
5 juin 2007 2 05 /06 /juin /2007 20:46
Si je veux vous dire quelques mots aujourd’hui, ce n’est pas pour vous parler de mon père en tant que tel mais vous parler de mon père en tant qu’homme, en tant que président.
 
Papa était peu connu dans les réseaux sociaux classiques qui tissent les liens entre les hommes et les femmes, il faisait pourtant souvent parti de ces personnes anonymes qui usent de leurs convictions et de leurs chaussures pour exprimer leur colère, leur indignation et porter collectivement leurs idéaux.
 
Par sa rigueur et son sérieux, Papa était une fourmi lorsqu’il s’agissait de contribuer au développement de la société.
 
Papa était une cigale lorsqu’il s’agissait d’exprimer ses sentiments, de nous faire connaître ses états d’âme, de nous transmettre son amour
 
S’il y a bien un endroit où l’homme qu’il était a pu réunir ses deux facettes, c’est au Jardins des Goubelets.
Fourmi il était par l’engagement qu’il a mis au service de ce lotissement, avec d’autres comme Dédé, Christian, Albert et j’en passe.
Cigale il était comme animateur, pom pom girl, chef sioux et amateur de rosé
 
Oui, c’est bien ici qu’il a su trouver c’est équilibre social fragile et si précieux, qu’il a su agir et profiter à la fois.
 
 
Ce lotissement et toute l’animation qui le caractérise aujourd’hui comme chaque année, ont été pour mon père une façon d’embrasser l’humanité toute entière, de participer à la conquête de son idéal avec le plus d’humanisme possible. Par delà son idéal de paix, d’égalité, de justice, d’honnêteté et de progrès social, sans arrogance et sans préjugé, il a su composer avec la diversité des êtres qui ont croisé son chemin ici-même.
 
Ce lotissement a été pour moi le lieu de la camaraderie, des amitiés, des bastons aussi des fois. C’est ici, dans ma jeunesse, que s’est construite une partie de mon identité.
Alors aujourd’hui, quand la roue tourne et que nos jeunes prennent à leur tour les rênes dans l’organisation de cette fête, c’est à elle et à celle qui sommeille encore en chaque adulte, que je veux dire un mot.
 
Ces mots, je les emprunte à Jaurès, grand pourfendeur de l’inégalité sociale, parce qu’il partageait les mêmes idéaux que mon père, la même vision humaniste. À moins que ce ne soit l’inverse…
 
Et puisque tout le monde en ce moment s’arroge le droit de se revendiquer de Jaurès, pourquoi pas moi ?!??
 
 
Voici quelques extraits de son discours à la jeunesse prononcé au lycée d’Albi en 1903 :
 
 
Ce premier extrait pourrait résumer en quelques mots l’humanisme de mon père :
 
« Je demandais à ceux qui m’écoutaient de juger les hommes avec bienveillance, c’est à dire avec équité, d’être attentif dans les consciences les plus médiocres et les existences les plus dénuées, aux traits de lumières, aux fugitives étincelles de beauté morale par où se révèle la vocation de grandeur de la nature humaine. Je les priais d’interpréter avec indulgence le tâtonnant effort de l’humanité incertaine. »
 
 
Et enfin parce qu’il nous a fallu et qu’il nous faut encore du courage, et que vous nous en avez transmis, quelques définition du courage par Jaurès dans ce même discours à la jeunesse :
 
« Le courage c’est d’être tout ensemble, et quel que soit le métier, un praticien et un philosophe. Le courage, c’est de comprendre sa propre vie, de la préciser, de l’approfondir, de l’établir et de la coordonner cependant à la vie générale. »
 
« Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire ; c’est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe, et de ne pas faire écho, de notre âme, de notre bouche et de nos mains aux applaudissements imbéciles et aux huées fanatiques. »
 
« Le courage, c’est d’aimer la vie et de regarder la mort d’un regard tranquille ; c’est d’aller à l’idéal et de comprendre le réel ; c’est d’agir et de se donner aux grandes causes sans savoir quelle récompense réserve à notre effort l’univers profond, ni s’il lui réserve une récompense. »
 
Jérémie